UNIVERSITÉ PARIS 1 - TPTI - PROMO XII FIRMITAS
LE LIEU ET L´OUTIL
dans la Charpenterie de marine


Figure 1 : « Pierre Lacour, Vue d’une partie du port et des quais de Bordeaux dits des Chartrons et de Bacalan, 1804-1806, huile sur toile 207 x 340 cm, Musée des Beaux-Arts de Bordeaux ». © Site web officiel de Wikipedia. Consulté le 30 juillet 2020.

Figure 2 : « Pascal De La Rose, Chantier de construction navale, 1708, huile sur toile, Musée de la marine de Toulon ». © Musée National de la Marine.


Figure 3 : « Chantier de construction navale des Astilleros de San Telmo ». © Sitte web officiel de la Fundación para la Etnografía y el Desarrollo de la Artesanía Canaria. Consulté le 30 juillet 2020. www.fedac.org.

Figure 4 : « Chantier de construction navale des Astilleros de San Telmo ». © Sitte web officiel de Fundación para la Etnografía y el Desarrollo de la Artesanía Canaria. Consulté le 30 juillet 2020. www.fedac.org.


Figure 5 : « Construction d’un bateau à l’intérieur d’un atelier ». © Site web officiel de Nautica Astilleros Carrasco. Consulté le 30 juillet 2020. http://www.astilleroscarrasco.com/la-empresa

Figure 6 : « Construction d’un bateau à l’extérieur d’un atelier ». © Ivelic K., Boris, Embarcación Amereida y la épica de fundar el mar patagónico, Valparaiso, Ediciones Universitarias de Valparaiso, 2005.



Figure 6 : « Maître artisan montrant l'endroit où un petit bateau est construit et les outils à utiliser ». © Sitte web officiel du La Voz de galicia. Consulté le 30 juillet 2020.

Figure 7 : « Dessin et outils impliqués dans la construction d'un bateau ». © Sitte web officiel de la revue Yorokobu. Consulté le 30 juillet 2020.

Sous-thématique 1 : La construction navale dans l’histoire.
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« Le chantier naval dans l’art »
D’après Stefano Zecchi « l’art n’est pas indispensable, mais il est ce qui donne un sens à notre vie, il est ce qui donne un visage visible à notre histoire, et nous fait connaître notre passé, en nous donnant une identité »[1]. Cette phrase donne une optique différente de l’art. Dès lors, porteur de valeurs historiques et documentaire, celui-ci constitue une clé de lecture des savoir-faire et du monde de la pratique. Une oeuvre d'art peut également jouer un rôle décisif en tant que ressource de témoignage historique, en montrant la dynamique, la logique et les modes de fonctionnement des sociétés précédentes, en les encadrant et en les immortalisant.
Comme nous pouvons le voir à travers les deux figures (figure 1) et (figure 2), l'objectif des artistes était de représenter les différents processus impliqués dans la construction et la réparation d'un bateau : les différentes phases de construction (de la coupe du bois à la mise en place de la quille, en passant par la mise à l'eau du bateau), les différents éléments constitutifs du chantier, le nombre d'artisans et la chaîne de production. Ainsi, compte tenu de la valeur de l'art comme moyen de représentation testimoniale, on peut dire qu’il permet de reconstruire une partie de l'histoire des différents processus de construction navale artisanale qui se sont développés au cours de l'histoire, agissant comme un élément de codification et de transmission du savoir-faire.
[1] Bembo, Paolo, la storia della marina attraverso i dipinti, Roma, UFFICIO STORICO DELLA MARINA MILITARE, p. 9.
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« Le chantier naval dans la photographie »
La photographie (bien qu'elle soit une invention contemporaine datant du début du XIXe siècle) ainsi que les représentations picturales, ont permis de montrer la réalité des ateliers de charpenterie de marine ainsi que les outils qui y sont utilisés. La composition photographique crée ainsi une scénographie avec les éléments matériels et les participants, peu importe l’intention du photographe. De cette manière on peut représenter la hiérarchie entre les travailleurs en fonction de leur position sur la photo ou leur habillement, la manière d’enseigner un savoir technique dans un atelier, ou bien encore le processus de construction d’un bateau dans un chantier particulier. Quelle que soit la raison, on peut constater avec la représentation photographique la symbiose entre théorie et pratique, le regarder et le toucher, qui fait de l'apprentissage technique quelque chose d’important.
Par exemple, nous pouvons apprécier dans les images ci-dessus l’ambiance de travail qui règne sur un chantier de construction navale des Astilleros de San Telmo (Las Palmas de Gran Canaria, 1890-1900). Il s’agit d’un chantier extérieur et par conséquent à la vue de tous. Nous pouvons identifier que le bois est le matériau principal de construction. Il est intéressant d’observer également la disposition des travailleurs et leur habillement. Dans la deuxième image, nous voyons comment la hiérarchie des seigneurs à gauche est clairement représentée par rapport aux autres travailleurs.
Sous-thématique 2 : Travailler dans un chantier.
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« L’organisation du chantier naval »
De l'Antiquité à nos jours, la construction navale a joué un rôle important et déterminant au sein de la société, en raison des diverses activités exercées par les navires comme le commerce, le transport, la défense et la pêche. Par conséquent, compte tenu de ce qui précède, il n'est pas surprenant que ce métier ait connu plusieurs avancées et modifications au fil du temps, au vu du caractère évolutif de l'humanité et de ses besoins.
Ainsi, les ateliers et les chantiers navals ont été l'objet et le témoin de grandes transformations telles que l'inclusion de nouveaux professionnels, de nouveaux matériaux, de nouveaux espaces, de nouveaux outils et de nouvelles demandes. Cela a eu pour conséquence l'émergence d'une chaîne de production composée de différentes étapes, où à chacune d'entre elles le bateau est construit. Cependant, malgré l'existence de cette chaîne de production, il n'y a pas de véritable organisation per se. Les différentes organisations que l'on pouvait trouver dans les anciens chantiers navals et même dans les ateliers d'aujourd'hui dépendent principalement du type d'activité (construction ou restauration), du type de bateau (marchand, pêche, défense, transport), du contexte dans lequel le bateau va naviguer (rivière, lac ou haute mer), de la taille du chantier naval et de la taille du bateau. Ce sont donc ces facteurs qui ont influencés la disposition des différentes phases d'organisation de chacun des ateliers ou chantiers navals. Ainsi, on peut voir sur les (figure 5) et (figure 6), deux types de navires qui impliquent une organisation, une construction et une localisation différentes dans l'atelier.
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« Les matériaux »
Dès l’arrivée de l’industrialisation, le bois est peu à peu devenu un matériau très rarement utilisé dans la charpenterie de marine. En Bretagne, le système de gestion des forêts n’est aujourd’hui plus adapté à la construction traditionnelle ce qui a peu à peu entrainé une diminution de la fabrication de bateaux de pêche traditionnels en bois ainsi qu’un glissement des techniques de construction et une évolution du savoir-faire grâce à l’introduction d’autres matériaux comme le plastique ou le métal. Cela induit une modification du lieu de travail ainsi que des outils utilisés.
Sous-thématique 3 : L’atelier et les outils.
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« Les éléments qui expliquent le fait du construire »
La pratique d’un métier artisanal ou technique impose un espace de travail (le lieu); et l’usage d’outils (instruments techniques). Chacun permet de définir l’autre au moment de l’usage d’un outil. En effet, le lieu commande l’usage d’un type d’instruments techniques spécifiques et associé à cet outil, il permet de définir à quel type de bateau on a affaire. L’atelier peut se différencier du chantier par la taille et la disposition de l’espace, la nature des outils ou encore que l’on soit en plein air ou dans un espace couvert, clos. Cette représentation est d’autant plus observable en charpenterie de marine où le lieu et l’outil ont un sens permettant d’entrevoir la technique en usage, le degré de technicité du charpentier et de complexité de son espace de travail, de son mode d’organisation. Ils permettent même, bien interprétés, de cerner la personnalité du maître des lieux et de ceux qui y travaillent.
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« L’atelier en tant que pierre angulaire de CoSaFer »
C'est en raison des multiples facteurs qui se trouvent au sein des ateliers et qui déterminent les différentes chaînes de production et d'organisation que le lieu (atelier), prend une telle importance et devient la pierre angulaire de la codification des savoir-faire. En conséquence, chaque atelier a des caractéristiques uniques visibles dans l'organisation des différentes étapes de la construction d'un bateau ; des matériaux et de leur utilisation et de la façon dont les maîtres artisans transmettent les connaissances aux apprentis. C'est pourquoi, compte tenu de la richesse des connaissances présentes dans chacun de ces lieux, les écomusées ou les musées in situ constituent aujourd'hui la stratégie la plus efficace pour sauvegarder et diffuser la construction navale artisanale. De cette manière, et comme l'établi Séguin Didier « Les muséalisasions in situ permettent de contextualiser ou de recontextualiser les objets et les messages. Les écomusées vont dans ce sens, leur but étant de redonner à l’objet son contexte d’origine pour qu’il puisse mieux transmettre son histoire ».[2]
[2] Séguin Didier, « Le patrimoine industriel du site des chutes des chaudières : enjeux de valorisation et muséalisassions dans une perspective de mémoire et d’identité locale et régionale québécoise », mémoire de muséologie et pratiques des arts, Université du Québec en Outaouais, 2016, 181 p.